Du 24 septembre au 5 octobre s’est tenue, à Johannesburg, la 17è conférence des parties de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, plus connue par son acronyme CITES.

Océans

CITES : un pas en avant pour la protection des requins

Du 24 septembre au 5 octobre s’est tenue, à Johannesburg, la 17è conférence des parties de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, plus connue par son acronyme CITES.


© Greenpeace / Will Rose

Qu’est-ce que la CITES ?

La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction a pour but « de veiller à ce que le commerce international des animaux et plantes sauvages ne menace pas la survie de ces espèces ».
Le constat est simple : de nombreuses espèces sont menacées de disparition du fait du commerce international. En se donnant les moyens d’encadrer ou d’interdire ce commerce, il est possible de limiter les risques de disparition. La CITES est connue pour avoir interdit le commerce international de l’ivoire en 1989. Ce sont environ 35 000 espèces qui sont classées à l’une ou l’autre des annexes de la CITES.

Interdire ou encadrer le commerce international : comment cela fonctionne-t-il ?

Il existe trois niveaux d’encadrement du commerce international, appelés « annexes ». Le classement en annexe I est la mesure de restriction la plus forte et a pour effet une interdiction totale du commerce international. Elle comprend les espèces indéniablement menacées d’extinction. Le classement en annexe II encadre et limite drastiquement les échanges commerciaux des espèces animales ou végétales, en particulier au moyen de certificats ou de permis qui deviennent alors obligatoires. Ces espèces ne sont pas immédiatement menacées de disparition mais leur exploitation et le commerce qui en est fait peuvent être une menace à court terme s’ils ne sont pas encadrés. Enfin, l’annexe III liste les espèces bénéficiant de protections nationales.

Lors des réunions des membres de la CITES, les niveaux de déclin et les menaces qui pèsent sur les espèces proposées sont examinés en vue du classement. Les propositions de classement sont ensuite soumises au vote. Pour qu’une espèce soit protégée, il faut un vote majoritaire des deux tiers des membres.

Lors de la conférence de Johannesburg, les requins soyeux (Carcharhinus falciformis), les requins-renards à gros yeux (Alopias superciliosus) ou encore les raies du diable (Mobula japanica) ont été classés à l’annexe II. C’est à la fois une reconnaissance des menaces et inquiétudes qui pèsent sur ces espèces, mais aussi un appel à une meilleure gestion de la pêche.

Quelles sont les menaces qui pèsent sur les requins ?

Ce ne sont pas les premières espèces de requins classées par la CITES. Déjà en 2013, lors de la précédente conférence, la totalité des raies manta, les requins océaniques à pointe blanche, ou des espèces de requins marteaux avait été classés en annexe II. Pour mémoire, les raies appartiennent à la même famille des poissons cartilagineux que les requins, et la très grande majorité des espèces de requins sont fortement menacées.

Les requins sont à la fois victimes de pêches ciblées et en même temps capturés comme prises accessoires, mais il s’agit donc avant tout d’un problème de surpêche dû aux méthodes de pêche des pêcheries au thon tropical. Tout le monde connaît les fameuses soupes aux ailerons de requins et la pratique très choquante de la découpe de ces ailerons. Mais est-ce donc un problème qui ne concerne que l’Asie ? Pas si sûr, même si la découpe des ailerons est interdite pour les flottes européennes.

Les flottes de palangriers des pays pêcheurs d’Asie capturent un grand nombre de requins. A un tel point que, dans certains cas, on peut se demander si ce sont réellement des prises accessoires, ou si ces requins, qui ont une réelle valeur commerciale, ne sont pas tout simplement ciblés… De leur côté, les thoniers senneurs, ces navires industriels qui approvisionnent les marchés mondiaux du thon en conserve, sont responsables de prises accessoires de requins dues à l’utilisation incontrôlée des dispositifs de concentration de poissons (DCP).

Le requin soyeux, une vieille connaissance

Attardons-nous un peu sur le cas du requin soyeux. Dans l’océan Indien, d’où vient l’essentiel du thon présent dans les placards des ménages français, ce ne sont pas moins de 900 000 requins soyeux qui sont capturés chaque année par les thoniers industriels du fait de l’utilisation des DCP. Or, près de 98% de ces captures se font lors de pêche sous DCP. A l’inverse, dans le cas de la pêche sur banc libre (sans DCP), les prises accessoires de requins sont très négligeables.

Lors de l’expédition de l’Esperanza en avril et mai dernier dans l’océan Indien, nous avons pu avoir confirmation de ce constat. Sous la quasi-totalité des DCP collectés par les équipes de Greenpeace, nous avons pu trouver des requins soyeux.

Un appel à agir

Au delà d’un meilleur encadrement du commerce de ces espèces, le classement par la CITES en annexe II est avant tout un appel à agir. La priorité est d’encadrer les pratiques de pêche, en particulier l’usage des DCP. Cela doit se faire dans le cadre des organisations comme la Commission des thons de l’océan Indien (CTOI), pour l’océan Indien. Mais les marques qui vendent du thon en conserve, telles que le leader français Petit Navire, ont elles aussi un rôle à jouer en augmentant très largement la part de thon pêché sans DCP. C’est notamment pour cela que Greenpeace fait campagne pour que le groupe Thai Union, la maison-mère de Petit Navire, prenne des engagements ambitieux dans ce domaine. La route est encore longue.