Trafigura, cette multinationale néerlandaise à l'origine des déchets toxiques

Océans

Trafigura : nouvelles accusations de corruption

Trafigura, cette multinationale néerlandaise à l’origine des déchets toxiques déversés en Côte d’Ivoire en 2006, fait depuis hier l’objet d’une enquête menée par le procureur public des Pays-Bas. Trafigura est en effet soupçonnée d’avoir payé des pots de vin à un homme politique de premier plan en Jamaïque, en 2006.


En quoi cela nous concerne ?

En 2010, l’entreprise Trafigura Beheer BV a été condamnée pour avoir exporté de façon illégale des déchets toxiques depuis le port d’Amsterdam jusqu’en Côte d’Ivoire à bord d’un cargo, le Probo Koala. Mais la compagnie n’a pas été poursuivie pour le rejet de ces déchets, qui ont, selon les autorités ivoiriennes, causé 16 décès et ont eu des conséquences dramatiques sur la santé de dizaines de milliers de personnes.

Pourquoi ? Parce que le ministère public néerlandais considère que la recherche de la vérité en Côte d’Ivoire est trop difficile et qu’il n’a pas compétence pour poursuivre Trafigura pour un crime commis en Afrique.

Pourtant, concernant l’affaire dans laquelle Trafigura est aujourd’hui poursuivie pour corruption, la multinationale est soupçonnée d’avoir soudoyé un homme politique jamaïcain pour obtenir une extension de contrat concernant du pétrole nigérian… On voit bien qu’en la matière, le ministère public néerlandais poursuit l’entreprise sans avoir a priori de problème de compétence !

Pour Greenpeace, corrompre un homme politique est bien sûr hautement répréhensible et mérite une procédure pénale. Mais le fait d’avoir, probablement de façon délibérée, déversé des déchets toxiques, mettant en danger la santé des habitants d’Abidjan et méprisant leur droit à vivre dans un environnement sain, mérite le même traitement ! Greenpeace a donc lancé hier une procédure de recours au Pays-Bas. La Cour d’appel de La Haye doit décider d’ici deux mois si des poursuites seront finalement être engagées ou non.

Déchets toxiques d’Abidjan : la justice doit aller jusqu’au bout

Il y a maintenant de nombreux éléments qui prouvent la culpabilité de Trafigura dans le déversement de déchets toxiques en Côte d’Ivoire de 2006. En particulier des échanges de courriels internes, qui montrent que le management de Trafigura connaissait parfaitement la dangerosité des déchets et a fait le choix de les envoyer en Afrique pour s’en débarrasser à moindre frais.

Le ministère public néerlandais a également eu accès à certains témoignages choquants concernant la probable intimidation et la corruption possible de témoins importants, comme les pilotes ivoiriens qui ont transporté les déchets en 2006.

Enfin, cette affaire est elle aussi entourée d’un parfum de corruption. Des documents récemment obtenus par Greenpeace montrent que le directeur général du port d’Abidjan a séjourné à Paris, dans un hôtel de luxe, aux frais de Trafigura Beheer BV et cela seulement quelques mois avant le déversement des déchets toxiques dans le port par le Probo Koala, le cargo affrété par Trafigura. Le directeur général du port semble avoir joué, en coulisses, un rôle dans l’affaire des déchets. En outre, peu de temps après que le déversement des déchets, les autorités portuaires d’Abidjan ont stoppé l’inspection du Probo Koala et laissé partir le cargo. Autant d’éléments qui ont amené le comité d’enquête ivoirien à conclure, dès novembre 2006, que les autorités portuaires étaient impliquées dans l’opération de déversement des déchets et le départ très rapide du Probo Koala. Et malgré tout cela, le directeur général du port avait été réintégré à son poste par le président ivoirien…

Greenpeace a demandé Trafigura s’expliquer sur tous ces éléments. La multinationale refuse pour l’instant de répondre.